Paris, le 12 novembre 2025 – Le Conseil d’État vient de rendre une décision importante pour le secteur de l’immobilier de bureau et du coworking en confirmant la qualification de « locaux à usage de bureaux » pour des espaces de travail partagés, même s’ils sont accompagnés de services. Cette qualification maintient l’assujettissement de ces locaux à la Taxe Annuelle sur les Locaux à Usage de Bureaux (TSB).
Un litige autour de la TSB et du coworking
L’affaire opposait une société propriétaire de plusieurs lots totalisant 1.206 mètres carrés dans le 10e arrondissement de Paris, au Ministre de l’Économie. Ces locaux sont loués à une de ses filiales qui y exerce une activité de mise à disposition d’espaces et de services de « coworking ».
La société propriétaire contestait son assujettissement à la TSB pour les années 2018, 2019 et 2020. Elle soutenait que les locaux auraient dû être considérés comme des locaux commerciaux en raison de l’activité de coworking qui, selon elle, a une nature commerciale et inclut des prestations de services.
La distinction est en effet cruciale : l’article 231 ter du Code général des impôts (CGI) prévoit une exonération pour les locaux commerciaux d’une superficie inférieure à 2.500 mètres carrés, tandis que l’exonération pour les bureaux ne concerne que ceux de moins de 100 mètres carrés. Le seuil de 1.206 m² était donc imposable si les locaux étaient qualifiés de bureaux, mais potentiellement exonéré s’ils étaient considérés comme commerciaux.
L’utilisation effective prime sur l’activité du prestataire
Après avoir obtenu gain de cause en première instance devant le tribunal administratif de Paris, la société propriétaire a vu son jugement annulé par la Cour administrative d’appel de Paris.
Saisi en cassation, le Conseil d’État a donné raison à la Cour d’appel et au Ministre. Le cœur de sa décision repose sur le critère de l’utilisation effective des locaux au 1er janvier de l’année d’imposition.
- Or, le Conseil d’État a relevé que : Bien que la société locataire propose des prestations de services complémentaires (accueil, conciergerie, accès à des espaces de cuisine, convivialité, bien-être, etc.), les locaux en litige, munis des équipements nécessaires, « n’en demeurent pas moins utilisés effectivement comme bureaux par les clients à la disposition desquels ils sont mis par cette société. »
- La qualification retenue : Pour l’application de l’article 231 ter du CGI, ces espaces constituent donc des « locaux à usage de bureaux ».
L’incidence de la nature commerciale est écartée
La haute juridiction administrative a précisé que la nature commerciale de l’activité de la société locataire, invoquée par la requérante, n’a aucune incidence sur la qualification fiscale des locaux. C’est bien la destination finale et l’utilisation concrète de l’espace par l’occupant (travailler dans un bureau) qui est déterminante.
En conséquence, le Conseil d’État a rejeté le pourvoi de la société propriétaire, confirmant ainsi que les impositions contestées au titre de la TSB étaient légalement dues.
🔎 Conséquences pour le Coworking
Cette décision vient clarifier de manière définitive l’assujettissement à la TSB des espaces de coworking. Elle établit que les propriétaires de vastes surfaces de coworking ne peuvent pas bénéficier du seuil d’exonération plus élevé réservé aux locaux commerciaux.
- Rappel du principe : La fiscalité immobilière est basée sur l’usage réel du bien. Tant que l’espace est utilisé principalement pour des activités de bureau par les utilisateurs finaux, il est considéré comme tel, quelles que soient les prestations de services « commerciales » fournies par l’opérateur de coworking.
Cette jurisprudence ancre fermement les espaces de coworking dans la catégorie des bureaux aux yeux de l’administration fiscale, avec les conséquences que cela implique en matière de taxation immobilière.
Source : Conseil d’Etat, décision n° 494253 du 12 novembre 2025.







