Par un arrêt rendu le 13 novembre 2025, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a renforcé la protection des acquéreurs immobiliers. Elle précise deux points cruciaux : l’impossibilité pour un vendeur de s’abriter derrière une clause d’exonération s’il a été alerté par un professionnel, et l’obligation pour l’agent immobilier de vérifier la véracité des affirmations du vendeur.
L’achat d’une maison est souvent le projet d’une vie. Mais que se passe-t-il lorsque, peu après la vente, la toiture se révèle défaillante ? Dans cette affaire, des acquéreurs découvrent des désordres sur la toiture principale et celle du salon. Ils assignent la venderesse sur le terrain des vices cachés et l’agent immobilier pour manquement à son devoir de conseil.
La cour d’appel de Reims avait initialement rejeté leurs demandes. Mais la Cour de cassation a cassé cette décision sur deux fondements majeurs.
1. Vendeur de mauvaise foi : le silence est un vice
La plupart des actes de vente contiennent une clause exonérant le vendeur de la garantie des vices cachés. Toutefois, selon l’article 1643 du code civil, cette clause est inefficace si le vendeur connaissait le défaut.
Dans ce dossier, la cour d’appel avait estimé que la venderesse ne pouvait pas connaître le défaut de pente de la toiture du salon, car seul un œil professionnel pouvait le déceler. Elle ajoutait que pour la toiture principale, l’ancienneté du bâtiment devait inciter les acheteurs à la prudence.
La censure de la Cour de cassation : Le juge ne peut se contenter d’une analyse théorique. Il doit vérifier de manière concrète si le vendeur avait été informé. Or, les acquéreurs soutenaient qu’un couvreur, intervenant régulièrement chez la venderesse, l’avait alertée sur le mauvais état des toitures. En ne recherchant pas si ces avertissements avaient eu lieu, la cour d’appel a privé sa décision de base légale.
Ce qu’il faut retenir : Un défaut technique (indécelable pour un profane) devient un vice connu du vendeur si un professionnel l’en a averti préalablement à la vente.
2. Agent immobilier : l’obligation de vérifier.
Le second volet de l’arrêt concerne la responsabilité de l’agent immobilier. Ce dernier prétendait qu’il n’avait pas à vérifier la réalité des travaux d’entretien allégués par la venderesse (en l’espèce, une vérification de la toiture tous les deux ans), se bornant à fournir les diagnostics obligatoires.
La position de la Cour de cassation : S’appuyant sur l’article 1231-1 du code civil, la Cour affirme que l’agent immobilier commet une faute s’il ne vérifie pas les déclarations du vendeur relatives à l’entretien du bien. Si un vendeur affirme avoir fait réviser sa toiture périodiquement, l’agent doit s’assurer de la véracité de cette information avant de la transmettre aux acquéreurs.
| Responsabilité | Obligation confirmée par la Cour |
| Vendeur | Devoir de révéler les informations transmises par les artisans (bonne foi). |
| Agent Immobilier | Devoir de vérifier la réalité des entretiens et travaux déclarés par le vendeur. |
Conclusion : une exigence de transparence accrue
Cet arrêt marque une étape importante dans le formalisme des transactions immobilières. Il impose :
- Aux vendeurs : Une transparence totale sur l’historique des interventions techniques, sous peine de voir la clause d’exonération des vices cachés écartée.
- Aux agents immobiliers : Une posture active de vérification. Le professionnel ne peut plus être un simple « messager » des affirmations du vendeur ; il doit se faire le garant de la fiabilité des informations qui influencent le consentement de l’acheteur.
L’affaire est désormais renvoyée devant la cour d’appel d’Amiens, qui devra déterminer si, au regard des témoignages du couvreur et des factures (ou de leur absence), la mauvaise foi de la venderesse et la négligence de l’agence sont constituées.
Texte officiel : Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 13 novembre 2025, pourvoi n° 23-18.899, Inédit







