La Cour de Cassation vient de rendre une décision qui renforce la protection des maîtres de l’ouvrage dans le cadre d’un Contrat de Construction de Maison Individuelle (CCMI), en ce sens que, selon les juges, l’obligation de chiffrage des travaux essentiels par le constructeur s’étend aux raccordements aux réseaux publics, et ce, même lorsque ces travaux sont réalisés sur le domaine public et non sur le terrain du client.
📌 Les enjeux de la viabilisation oubliée
L’affaire opposait un maître de l’ouvrage à un constructeur, suite à la signature d’un CCMI. Après la réception de la maison, le maître de l’ouvrage a été confronté à des frais de raccordement aux réseaux (eau, électricité, téléphone) qui n’avaient pas été mentionnés, ni chiffrés, dans la notice descriptive du contrat.
Le maître de l’ouvrage, ayant dû supporter le coût de ces travaux indispensables à l’utilisation de sa maison (un peu plus de 10.000 euros), a assigné le constructeur en justice pour obtenir réparation. La cour d’appel lui a donné raison, jugeant que ces travaux devaient être inclus dans le prix forfaitaire initial, faute d’avoir été chiffrés.
📜 L’argument du constructeur rejeté
Le constructeur forma un pourvoi, arguant que les travaux de raccordement effectués au-delà de la limite de propriété (c’est-à-dire sur le domaine public) sont réservés aux gestionnaires de réseaux et sont, par essence, exclus du champ d’application du CCMI. Selon lui, leur coût n’avait donc pas à figurer dans la notice descriptive annexée au contrat.
⚖️ L’impératif d’information globale
S’appuyant sur les articles L. 231-2 et R. 231-4 du Code de la construction et de l’habitation (CCH), la Cour de cassation rappelle que l’objectif premier des dispositions du CCMI est d’assurer une information exacte et complète du maître de l’ouvrage concernant le coût global de son projet. Cet impératif vise à lui éviter de s’engager dans une opération qu’il ne pourrait pas financièrement achever.
Les juges tranchent en outre clairement la question de la délimitation géographique :
« Ces textes ne distinguent pas selon que les travaux doivent être exécutés sur le fonds du maître de l’ouvrage ou en dehors de ce fonds. »
La haute Cour donne donc raison à la Cour d’appel lorsque celle-ci affirme que l’obligation de chiffrage doit porter sur tous les travaux indispensables à l’implantation ou à l’utilisation de l’immeuble, ce qui inclut les frais de raccordement aux réseaux.
Peu importe :
- Qu’ils soient exécutés par des tiers (les gestionnaires de réseaux).
- Qu’ils soient réalisés hors du terrain sur lequel est édifiée la maison.
Ce qui compte, c’est que le coût de ces travaux doive être supporté par le maître de l’ouvrage.
✅ Conclusion
En conclusion, la Cour a jugé que dès lors que la somme réclamée correspondait au coût des raccordements aux réseaux (eau, électricité, téléphone) – travaux indispensables facturés au maître de l’ouvrage –, ils devaient obligatoirement être chiffrés dans la notice descriptive.
Le manquement du constructeur à cette obligation légale signifie que les travaux non chiffrés sont considérés comme compris dans le prix forfaitaire convenu. Le constructeur est ainsi condamné à en supporter le coût.
Cette décision est un rappel strict pour les constructeurs : la transparence sur l’intégralité du coût de l’opération, y compris les frais annexes de viabilisation et de raccordement, est une condition de validité des contrats.
Texte officiel : Cour de cassation, Troisième chambre civile, Pourvoi n° 23-21.280, 11 décembre 2025 ; publié au Bulletin.
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