Réforme de la garantie collective des notaires : ce que change le décret du 29 décembre 2025

Publié au Journal officiel ce 30 décembre 2025, le décret n° 2025-1379 marque une étape importante dans l’organisation de la profession notariale. En modifiant les textes historiques de 1934, 1955 et 1956, le gouvernement renforce la solidarité entre les offices tout en centralisant davantage les mécanismes de garantie, et en renforçant les moyens de contrôle.

Voici le décryptage des principaux changements.

1. Une centralisation accrue autour de la Caisse Centrale

L’évolution majeure de ce décret réside dans le rôle pivot désormais accordé à la Caisse centrale de garantie. Jusqu’alors perçue comme un soutien subsidiaire, elle devient l’organe de pilotage de la sécurité financière de la profession.

  • Avances systématiques : La procédure est simplifiée pour permettre à la Caisse centrale de fournir plus efficacement aux caisses régionales les avances nécessaires pour indemniser les clients en cas de défaillance d’un notaire.
  • Contrôle renforcé : La Caisse centrale dispose désormais d’un pouvoir de contrôle sur site et sur pièces (au moins tous les 5 ans) sur les dossiers et la comptabilité des caisses régionales.
  • Mutualisation totale de l’actif net : Désormais, chaque caisse régionale doit verser à la Caisse centrale l’intégralité de son actif net au 31 décembre de l’année précédente, contre seulement une fraction auparavant.

2. De nouveaux leviers d’action : assurance et recours

Le texte offre de nouveaux outils juridiques pour sécuriser le système :

  • Assurance collective : La Caisse centrale peut désormais souscrire un contrat d’assurance pour le compte de l’ensemble des caisses régionales. Cela permet de négocier de meilleures conditions et d’homogénéiser la protection au niveau national.
  • Action récursoire directe : Innovation notable, si une caisse régionale ne parvient pas à récupérer les fonds auprès d’un notaire défaillant, la Caisse centrale peut désormais exercer elle-même une action récursoire directement contre ce notaire.

3. Une terminologie modernisée : du « notaire » au « titulaire d’office »

Le décret procède à une mise à jour sémantique révélatrice des évolutions de la profession (notamment l’exercice en société). Le terme « notaire » est systématiquement remplacé par celui de « titulaire d’office » pour le calcul et le paiement des cotisations.

Par ailleurs, la carte des caisses de la région parisienne est actualisée pour correspondre à la réalité administrative actuelle (Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne, Essonne, etc.), effaçant les dernières traces de l’ancien département de la Seine.

4. Abrogation du décret historique de 1934

Le décret du 12 juillet 1934 est officiellement abrogé. Ce texte définissait les contours des sommes couvertes par la garantie (fonds reçus à l’occasion des actes authentiques, mandats de justice, etc.).

À noter : Cette abrogation s’inscrit dans une volonté de simplification, les principes de garantie étant désormais intégrés et clarifiés dans les décrets de 1955 et 1956 modifiés.

5. Une prévention des risques musclée : le « tuteurage » modernisé

Un autre apport majeur du décret concerne le mécanisme de surveillance des études présentant des fragilités. Le texte passe d’une logique de simple surveillance à un véritable dispositif d’accompagnement et de contrôle renforcé.

Élargissement des signaux d’alerte

Auparavant, seules une inspection ou une vérification comptable pouvaient déclencher la désignation d’un contrôleur. Désormais, la Caisse régionale peut intervenir dès lors que des mises en cause de responsabilité ou de simples réclamations révèlent des négligences ou un comportement à risque.

À noter : Le notaire lui-même, ou sa société d’exercice, peut désormais solliciter spontanément cet accompagnement s’il se sent en difficulté.

Un pouvoir d’investigation quasi-illimité

La personne désignée pour examiner l’office (un notaire en exercice ou un ancien notaire de moins de cinq ans) dispose désormais de droits très étendus :

  • Consultation, recherche et copie de tous supports et documents jugés utiles.
  • Possibilité d’être assistée par des experts tiers (spécialistes en audit, experts-comptables, etc.) si la complexité du dossier l’exige.

Une procédure contradictoire et transparente

Pour garantir les droits du notaire visé, la décision de mise sous surveillance ne peut être prise qu’après que l’intéressé a été invité à présenter ses observations. Une fois la mission terminée, un rapport final est établi et transmis non seulement à la Caisse régionale, mais aussi au Procureur Général et à la Caisse centrale, assurant une transparence totale sur les suites à donner (disciplinaires ou pénales le cas échéant).

Responsabilisation financière

Si le dispositif reste initialement à la charge de la Caisse régionale (frais de gestion), le décret introduit une dimension punitive : si le notaire inspecté refuse de suivre les avis et recommandations du contrôleur, l’intégralité des frais de la mission (indemnités du contrôleur et des experts tiers) peut être mise à sa charge personnelle.

Conclusion : Une profession sous haute surveillance

Avec ce décret n° 2025-1379, le notariat se dote d’un arsenal complet. En centralisant les fonds et en renforçant les capacités d’intrusion préventive dans les offices « à risque », la profession entend protéger son image de marque et sa garantie collective, jugée indispensable à la sécurité juridique des Français.

Lien vers le texte officiel : Décret n° 2025-1379 du 29 décembre 2025, J.O. du 30.

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